Joan Pau Giné (né le 3 octobre 1947, à Bages et décédé le 6 juin 1993, à Vailhourles) était un auteur-compositeur-interprète. Issu d'une famille exilée, originaire de la Serra d'Almos, Tarragone. Il se fait connaître artistiquement en 1976, et devient rapidement le chanteur catalan le plus populaire du Roussillon, aux côtés de Jordi Barre.
Joan Pau Giné, auteur-compositeur-interprète catalan né à Bages près de Perpignan, est une figure marquante de la Nova Cançó en Catalogne Nord. Poète du quotidien, il célébrait le catalan roussillonnais, un dialecte souvent marginalisé, qu’il utilisait pour exprimer des émotions profondes et des critiques sociales, tout en valorisant la culture populaire. Giné alliait humour mordant et tendresse, captivant le public avec des chansons accessibles mais riches de sens.
Sa carrière, marquée par une approche simple et directe avec son public, mêlait satire et réflexion, que ce soit dans des récits comme La capuxeta roja ou La nit de Frankenstein, des hommages à la vie rurale avec Bages ou Padrina, des critiques sociales avec Diguem’ho ou Els mestres educats, des odes poétiques à la catalanité avec Parla-me diguis-me coses ou La marinada. Refusant tout centralisme linguistique, il prônait la diversité des dialectes catalans comme une richesse culturelle. Il dénonçait les « ayatollahs de la linguistiques » qui avaient « frappé d’excommunication le pur produit du Roussillon » qu’il était.
Apprécié pour sa joie de vivre, son engagement sincère et sa proximité avec les gens de nos villages, il transformait la chanson en un outil de communication et d’éveil. Admiré pour son énergie et son esprit malicieux, Giné a su laisser une empreinte durable, célébrant un catalan vivant, tiré des champs et des rues, plutôt que des livres savants.
Les Angelets de la Terra lui ont rendu hommege en 2013 en faisant reprendre toutes ses chansons par des groupes de tous les Pays Catalans.
Enfance et adolescence :
Né en 1947 à Bages, Joan Pau Giné découvre la culture catalane à travers des conférences et s'intéresse à la musique et au théâtre. Il forme un duo musical avec Pierre Figueres et s'oppose aux tendances musicales populaires de l'époque, favorisant la poésie et la rébellion.
Études et débuts artistiques :
Dans les années 1960-70, il poursuit des études de lettres et de psychologie à Lyon, Montpellier et Paris tout en travaillant et perfectionnant sa pratique de la guitare. Durant ses retours à Bages, il s'intéresse à la musique catalane renaissante et commence à écrire des chansons en catalan.
Période "Adiu ça va" (1973-1982) :
De retour à Bages en 1973, il enseigne et s’investit pleinement dans la création musicale en catalan. Il se fait connaître grâce à des concerts dans les villages, notamment en duo avec d'autres artistes. Son premier album Adiu ça va sort en 1978. Il organise des festivals de culture catalane, devenant une figure majeure de la chanson engagée en Catalogne Nord.
Années parisiennes (1984-1993) :
Joan Pau s’installe à Paris, où il enseigne tout en continuant à écrire et à chanter, surtout en catalan. Il découvre la sophrologie, obtient un diplôme en 1990, et envisage d’en faire sa profession. Malgré un exil relatif, il reste actif dans la promotion de la culture catalane, retournant régulièrement en Catalogne Nord pour se produire.
Décès et héritage :
Joan Pau Giné meurt en 1993 dans un accident de voiture, après un récital à Castelnou. Artiste profondément engagé et poète populaire, il laisse une empreinte durable dans la culture catalane, incarnant la tendresse et la rébellion avec un style unique.
ean Paul Giné, né à Bages le 3 octobre 1947, est le fils de Joan, agriculteur originaire de la région de Tarragone, et d’Étiennette Fabre, épicière. Après un bac de philosophie obtenu en 1965 au lycée Arago, il suit des études en sciences humaines à Lyon, puis à Montpellier. À partir de 1973, il est instituteur remplaçant à Bourg-Madame, Osséja, Saint-Paul-de-Fenouillet, Bompas et Thuir avant de démissionner de l’Éducation nationale en 1982. Il s’occupe des terres familiales jusqu’en 1984, puis devient enseignant en maths, physiques et lettres modernes à la Chambre syndicale de la coiffure et à celle de la Haute couture en région parisienne, et ce, jusqu’à sa disparition. En 1990, il valide un cursus de formation de trois ans en Andorre avec Guischoun Cayecedo, fondateur de la sophrologie, avec l’objectif d’en vivre et de s’installer à plein temps dans son village de cœur, Bages, à qui il dédie une chanson (édition du 4 mai 2023).
En 1966, il crée le Théâtre des Aspres et commence à chanter en français ses propres textes qu’il compose à la guitare. En 1975, il chante pour la première fois des textes de son cru en catalan et rejoint, en 1976, le groupe Guillem de Cabestany, qui rassemble des chanteurs militants se revendiquant de la Nova Canço (mouvement musical catalan antifranquiste né à la fin des années 1950 et promouvant la langue catalane interdite à l’époque dans l’espace public). En 1977, il organise le Primer festival de cultura catalana à Bages (puis ultérieurement à Elne et à Marquixanes). Il rencontre Malou, sa première compagne, qui le seconde techniquement. En 1978, il produit son premier album 33 tours, Adiu ça va. Le vocabulaire utilisé est simple et accessible. Il y décrit, avec humour et tendresse, la vie quotidienne en pays catalan. En 1984, c’est la sortie d’un second album, Bonat nit cargol, et la rencontre avec Dominique, sa seconde compagne.
En 1991, il anime à Paris, sur Radio Pais, une émission Adiu ça va, où il raconte des histoires et reçoit des chanteurs catalans. En 1993, sa brutale disparition émeut tout le département, qu’il avait sillonné de long en large à raison de 40 à 50 concerts par an. Il était resté un chanteur populaire et plus de 1 500 personnes sont venues à ses obsèques. Trente années sont passées… Dominique Béraud-Giné, sa seconde épouse, et Denise Soladie, sa petite cousine et présidente de l’association des Amis de Joan Pau Giné, se souviennent de celui qui était surnommé affectueusement El merla rialler (Le merle rieur).
"Il était engagé pour la défense du catalan roussillonnais. Il a écrit une seule chanson en catalan barcelonais. Cela lui a limité la possibilité de débouché pour ses disques, mais la reconnaissance ne l’intéressait pas. Il a aussi participé à la publication d’une méthode d’apprentissage du catalan roussillonnais ‘‘Els llibrets d’en Titella’’. Mais, il a aussi aimé chanter en français."
"L’amitié était pour lui très importante. Quand un ami passait à l’improviste, on rajoutait un couvert. Il improvisait des chansons dans le jardin. Les voisins étaient invités à venir écouter."
"Pour nous, il n’a pas disparu. Chaque commémoration de dizaines s’est toujours faite dans la douleur. Cette année, la récente disparition de Patrick Soladie (édition du 28 mai 2023), dont il était très proche, ne nous donne pas envie de faire quoi que ce soit." La mémoire de Joan Pau Giné est maintenant entre les mains de ses enfants Léa, Marie et Simon, qui avaient respectivement 14, 8 et 2 ans au moment de sa disparition. "Pour eux, ce n’est pas simple de séparer le père de l’artiste. Ils se sentent peut-être dépossédés d’une histoire qu’ils n’ont pas vécue, même s’ils sont fiers de l’artiste qu’il fut." Son œuvre deviendra-t-elle l’héritage commun des Catalans du nord ?
Joan Pau Giné était l'un des chanteurs qui, en Catalogne Nord, étaient l'équivalent, dans les années 70 et 80, de ceux de la Nova Cançó catalana au Sud. Giné est celui qui utilise le plus la variante roussillonise du catalan pour écrire ses poèmes et ses chansons. Dans ces années-là, donner un statut littéraire à la langue courante des Roussillonnais a représenté un choc pour les mentalités éduquées dans le jacobinisme de l'école française, où toute langue non française était méprisée et décrite comme patois par des "Mestres Educats" (instituteurs instruits) que le chanteur décrit dans l'une de ses chanson et dont il fait lui-même partie avant de démissionner de l'Education Nationale.
Joan Pau Giné a commencé sa carrière artistique en 1976, en alternance avec son métier d'éducateur, qu'il a exercé dans les écoles de la région parisienne où il avait été affecté. Il devient le chanteur le plus populaire des comtés catalans sous administration française, aux côtés de Jordi Barre, Albert Bueno, le groupe l'Agram et Pere Figueres. Lors d'un de ses voyages de Paris au nord de la Catalogne, pour se produire, il a été tué dans un accident de voiture.
Homenatge a Joan Pau Giné
En 2013, a l'inciativa dels Angelets de la Terra, més de noranta cantants i grups d'arreu dels Països Catalans s'han reunit en un mateix projecte, sota el nom Cantem Giné, interpretant temes del repertori de Joan Pau Giné, mort prematurament el 1993 en un accident de circulació, tornant al Rosselló des de París. Aquest projecte es tradueix en una edició de quatre CD, un digipack amb quatre solapes i 92 cançons del cantant rossellonès, interpretades per un intèrpret cada una. Una edició collector inclou un llibre de 224 pàgines amb textos de Donald Smith i Jaume Queralt, així com els textos de totes les cançons i una traducció al francès.
Els intèrprets que s'han ajuntat en aquest projecte representen noves veus, sovint grups molt joves, al costat de cantants ja molt consolidats. Les cançons que Giné interpretava tot sol amb una guitarra, es converteixen ara en rumba, salsa, reggae, ska, punk, rock i blues.
Entre els artistes que hi participen trobem els actors Sergi López i Joan Anguera, amb músics com ara Julio Leone, Llamp te Frigui, Buenasuerte, Marina Rossell, Gerard Jacquet, Stéphanie Lignon, Pascal Comelade, Pere Figueres, Meritxell Gené, VerdCel, Titot & David Rossell, Carles Belda, Josep Tero,...
En aquests quatres discos, la poesia de Giné es mostra “viva i actual”, segons els promotors del projecte, l'associació Angelets de la Terra i el Col·lectiu Joan Pau Giné. El català rossellonès de Giné s'enriqueix, en aquestes gravacions amb els accents dels artistes de la Catalunya Nord, el Principat, les Illes Balears, el País Valencià, la Franja de Ponent, l'Alguer, l'Andorra i l'Occitània.
D'aqueixa edició en quedaren fora versions alternatives de Bertomeu (en va fer una que va ser integrada als discos), Lluís Vicent, Orxata Sound System, Donallop, Miquel Pujadó i Marc Serrat.
Canten Giné rep el premi "Coup de coeur" de l'Académie Charles-Cros 2015.
Concerts Canten Giné
L'àlbum es va presentar oficialment el 26 d'abril del 2014 al vilatge natal de Giné, Bages de Rosselló, amb un recital d'Els Delai, Ghetto Studio, Meritxell Gené, Norha, Sr. Mit i VerdCel;
Altres concerts:
- al Palau dels Reis de Mallorca (22 de juny 2014, amb Carles Belda, Projecte Mut, Marta Elka, Buenasuerte, Rosa Luxemburg, La Carrau, "Rossellonès tribute" amb Gerard Jacquet, Pere Figueres i Llamp te Frigui;
- a Palma (5 de setembre 2014, amb Antoni Nicolau, Es Reboster, Elka i Pere Figueres),
- al Teatrino del Liceu de Barcelona (27 de novembre 2014; amb Pere Figueres, Meritxell Gené, Albert Jordà, Montse Castellà, Didac Rocher i VerdCel);
- al teatre d'Alcoi (14 de març 2015, amb Atzukak, Albert Bertomeu, Clara Andrés, Gent del Desert, Ghetto Studio, Llamp Te Frigui, Lluís Vicent, Òwix & M.M., Pere Figueres i VerdCel);
- al teatre municipal de Perpinyà (25 d'abril 2015, amb Madretomasa de Oriol Vilella, Andreu Valor, Bonobos, Dídac Rocher, Patch i Blues de Picolat);
-a l'auditori de Girona (21 de novembre 2015, amb Carles Dénia, Verdcel, Pascal Comelade amb Pere Figueres, Marta Elka i Dídac Rocher).
La Marinada
La marinada
Aqueixa amiga amb els ulls blaus
Encara els morros molls de sal
Aqueixa filla de l'onada
La marinada
És la promesa en fi de tarda
Quan l'estiu empresona l'aire
D'una mar un poc tracassada
La marinada
És una gàbia sense ocells
És una mà dins dels cabells
Quan la platja ha estat desertada
La marinada
És un pi que torna a parlar
Són els senills que fan sonar
Totes les aimes de la prada
La marinada
És una barca sense el rem
És una vela que se'n vén
Amb un record de passejada
La marinada
És una història que han negat
I que s'aixeca de la mar
És la memòria retrobada
Diguem-ho
Vos que voleu la llibertat
que la porteu dins del programa
vos demanarem la caritat
d’una existència catalana.
I vos deixem la llibertat
de vos disputar els afers
d’un país generós de guerres
que nos ha pas mai estimat.
Diguem-ho
Vos que teniu la dignitat
com principal referència
respecteu nostra identitat
que és n dret a la diferència.
I vos deixem la dignitat
de vos fer col·laboradors
d’un país colonitzador
que nos ha pas mai respectat.
Diguem-ho
Vos que voleu l’electorat
que condiciona la misèria
vos direm catalanitat
amb el nostre afany de sempre sere
I vos deixem l’electorat
si hem de fer el ramat d’ovelles
ja que amb les vostres cantarelles
acabem de ser afrancesats.
Parla-me, diguis-me coses
Parla-me, diguis-me coses
Amb aqueixa llengua rosa
Que arrossega pels carrers
Diguis-me coses boniques
Diguis-me coses ben dites
Sense pensar en res més
Parla-me, diguis-me coses
Amb aqueixa llengua boja
Que se perd en caminets
Diguis-me que la setmana
Quan s'acaba nos enganya
Igual que la fi del mes
I potser, potser, me faràs content
Per estimar cal tenir temps
Com una mar retirada
A la fi de la jornada
Tornem a ser tots solets
Diguis-me coses boniques
Diguis-me coses ben dites
Per demà cal ser refets
Cada dia una cadena
Te se posa sus l'esquena
Com vols fer per fer projets
Diguis-me lo que se passa
Amb la llengua de casa
La que a escola t'han defès
I potser, potser, me faràs content
Per estimar cal tenir temps
Tenes ganes de fer coses
I a la plaça te reposes
o sabes pas més on ets
Diguis-me coses boniques
Diguis-me coses ben dites
Caminem prou de través
Parla-me, diguis-me coses
Amb aqueixa llengua rosa
Que fa vergonya al burgès
Diguis-me que la perola
Dessús del foc de la història
Ten el tap que en pot pas més
I potser, potser, me faràs content
Per estimar cal tenir temps
I potser, potser, me faràs content
Per estimar cal tenir temps.
Espieu
Espieu la mar
espieu la plana
espieu el sol
espieu la muntanya
espieu, tenim dues llengües
una pel dia i una per la nit
Que t'han la mar
fas carulla trista
els teus ulls tan blaus
qui te'ls trepitja
a l'estiu te deixen rebentada
i a l'hivern t'emplenen de casots*
Espieu la mar
espieu la plana
espieu el sol
espieu la muntanya
espieu, tenim dues llengües
una pel dia i una per la nit
Que t'han fet la plana
tu també te n'ets vistes
a còpia de desherbants
i de produïts ximiques
tot just si hi ha un parpallol que voli
i un llapín que sigui acampat
Espieu la mar
espieu la plana
espieu el sol
espieu la muntanya
espieu, tenim dues llengües
una pel dia i una per la nit
Espieu la mar
espieu la plana
espieu el sol
espieu la muntanya
espieu, tenim dues llengües
una pel dia i una per la nit
Que t'han fet el sol
tu que sempre riues
aqueix amor del sou
veiam lo que en diues
fas pas hores suplementàries
mes peraixò te saben aprofitar
Amb prou diners
te munten i te baixen
t'han robat la neu
i te roben les vaques
muntanya sempre seràs muntanya
quan el vent t'haurà escombrat el pols*
Espieu la mar
espieu la plana
espieu el sol
espieu la muntanya
espieu, tenim dues llengües
una pel dia i una per la nit.
El temps de les cireres
Quan el cantarem el temps de les cireres
Pel rossinyolet i el merle rialler
Serà dia de festa
Les nines tindran la mirada llesta
I els enamorats un sol al paller
Quan el cantarem el temps de les cireres
Xiularà de bo el merle rialler
Mireu que és ben curt el temps de les cireres
Quan de dos en dos se cull en somiant
Penjolets d'orelles
Cireres d'amor de roba vermella
Vessant pel fullam com gotes de sang
Mireu que és ben curt el temps de les cireres
Penjols de coral cullits en somiant
Un cop que hi sereu al temps de les cireres
Si vos fan fremir les penes d'amor
Aneu lluny de les nines
Jo que tinc pas por d'engolir espines
Belleu patiré de la mala sort
Un cop hi sereu al temps de les cireres
També ne tindreu de penes d'amor
L'estimaré sempre el temps de les cireres
És ell que em va fer al mig del meu cor
Una esgarrinxada
I si la fortuna me sigués donada
Per jo mai seria un remei prou fort
Sempre estimaré el temps de les cireres
I aqueix record que n'hi tinc al cor.
Biografia d'en Joan Pau Giné
1) IFANTESA I ADOLESCENCIA
3 d’octubre de 1947, naixement de Jean-Paul (que esdevindrà més tard Joan Pau) a Bages, en el Rosselló. La seva mare, Etiennette Fabre, és comerciant i el seu pare, Joan Giné (originària de la Serra, província de Tarragona) és un agricultor.
Jean-Paul va en primària a l'escola pública.
Educació secundària en curs complementari de Tuïr.
Anys 1963-1965: educació secundària a l'Institut Aragó de Perpinyà.
Va participar en la creació de l'associació "Charles Fourier." Primers contactes amb la cultura catalana a través d'una conferència de Pau Roure (pare de Jaume Roure, tinent d’alcalde de 1993 a 2014) sobre els Almogàvers. La seva activitat és centra en la cançó i la música donant una conferència sobre Georges Brassens.
El 1966, crea el "Teatre de les Aspres" (esbossos, cançons, recital de poesia) i compleix amb Pierre Figueres, de Pontellà. Jean-Paul i Pierre encara no són Joan Pau i Pere. Tots dos canten en francès, els primers els seus propis textos i també "El Desertor" de Boris Vian, popularitzada per Serge Reggiani; el segon canta textos gairebé exclusivament d’en Brassens, però ja ha inclòs en el seu repertori "Al vent" d’en Raimon.
A favor de la cançó amb lletra poètica i de rebel·lió, en contra de la moda "yé-yé" (de la música pop).
Curta estada a París amb el seu cosí Guy Trilles. Treballen a les « Halles » com a manipuladors que transportaven mercaderies des de l'exterior cap a l'interior dels pavellons.
2) LYON, NANTUA, MONTPELLER
El 1967, va deixar Bages per fer estudis superiors.
En primer lloc a la Universitat de Lió, anys 1967-1968; es va matricular a la Facultat d'Arts i Humanitats a la secció "Psicologia".
Esdeveniments de "maig 1968": es va traslladar a París amb Guy Trilles.
Anys 1969-1970: es va matricular a la secció "Literatura Moderna".
Finança els seus estudis treballant de supervisor escolar a l’Institut de Nantua (Departament Ain), i en algun moment, en una empresa que fabrica de matalassos de metall.
Anys 1971-1972: se'n va anar a la Universitat de Lió i Montpeller, secció "Literatura Moderna".
Segueix treballant en diferents establiments del Roine.
Durant aquest temps, Giné va perfeccionar la seva pràctica de la guitarra i escriure cançons en francès. Durant els períodes de vacances a Bages, es va adonar d'un auge en la cançó català del nord.
3) ANYS "ADIU ÇA VA"
Anys 1973-1982: retorn a casa d'estiu de 1973, després de sis anys d' "exili".
Giné és emprat pel Ministeri d'Educació com un substitut docent a la Guingueta d'Ix (Bourg-Madame), Oceja, Sant Pau de Fenolhet, Tuïr i Bompàs.
Va ser durant aquest període d'uns deu anys que afirma el seu desig d'escriure cançons i viatjar pels pobles per cantar.
A més de Pere Figueres, el vell amic de la banda "Guillem de Cabestany", el primer grup d'activistes dels cantants de "Nova Cançó", va conèixer a molts dels que expressaven la vitalitat creativa de parla francesa: Antoine Candélas, Serge Llado, Guy Jacquet, Philippe Olivier, François Desnuelles.
S'uneix amb el "Théâtre de la Rencontre" i la "Comédie du Roussillon", de Jean Darie et Marie Rouvray.
No va tardar molt de temps per passar al català.
Al juny de 1975, sota l'ègida dels "Amis de Truc", canta primers textos seus en català, incloent-hi "L'Adam", en un cabaret a Argelers de la Marenda.
1976 és l'any de la seva "conversió" al català. Es va unir al grup "Guillem de Cabestany".
Fa la primera part d'un concert de Pi de la Serra al Palau dels Congressos de Perpinyà, apareix en el cartell de la segona edició de "Les sis hores de cançó" al Palau dels Reis de Mallorca, canta al "Marché de Gros" sota la carpa del "Grain de Sel".
L'1 de desembre, primer concert en solitari a Sant Nazari de Rosselló i obté la seva verdadera consagració en la nit de Nadal a Toluges.
El 1976, la premsa parla d'en Giné. El diari "L'Indépendant" (de Perpinyà) publica el 19 de desembre les paraules de la cançó "El cuc" i en la seva edició del 8 de gener de 1977, fa una llarga lloança escrita pel cantant Antoine Candélas, amb el títol "Les mots de Joan Pau Giné". El 30 de juny, el mateix diari va publicar un àlisi de l'escriptor Pere Verdaguer "A propos de Joan Pau Giné et la nova cançó rossillonesa" ("Sobre Joan Pau Giné i la nova cançó rossellonesa"); seguit, el 2 de desembre d'una breu entrevista recollida pel poeta català Joan Morer (de l'associació de Ribesaltes "Llavor").
Per tant, sol o en "tàndem" (amb Maria Andrea, Pere Figueres, Joan Cayrol, Teresa Rebull o Toni Montané), actua en els pobles de Catalunya Nord, entre quaranta i cinquanta cada any. Participa en "Festes Majors", en els mítings de solidaritat social, sindical o política.
Es va convertir en un "actor" capdavanter del paisatge musical nord-català.
Organitza, a finals de juny i principis de juliol de 1977, el "Primer Festival de Cultura Catalana" a Bages. El seu èxit popular mostra que el cantant poeta també és capaç d'imaginar i realitzar projectes molt ambiciosos.
Per exemple, reunirà representants de la creació en català (cançó, teatre ...) amb l'avantguarda artística. Jean-Louis Vila, Michel Fourquet, Marc Fourquet, Patrick Gifreu participaran en aquest primer festival.
El català, és cert, era de moda en aquest període. El lema "Volem viure a país" estava en l'aire, Catalunya Sud en efervescència i localment les associacions "autonomistes" i "independentistes" que feien sentir les seves reivindicacions a través de "La Falç" eren particularment actius. D'altra banda, el P.C.F. la P.S.U. i fins i tot L.C.R. la C.G.T. o C.F.D.T. amb posicions i comportaments diferents, no giraven l'esquena a aquestes reivindicacions "catalanistes" o "regionalistes" de finals de 1970, que són els de la denúncia d'un cert tipus de desenvolupament turístic costaner, les lluites ambientals i antinuclears (per exemple a Illa 'de Tet'), de defensa dels empleats de les empreses en perill (per exemple, "Punto Blanco" i, una mica més tard, les nines "Bella").
Uns anys de militància potent, durant els quals, amb una guitarra i una cadira, Joan Pau Giné va cantar: "L'allioli", "Pensa te", "Parla-me diguis-me coses", "L'Adam", "El cuc", "El meu país", "Cremat l'home", "Adiu ça va"...
"Adiu ça va" : El títol no és irònic. Aquest és un període de gran intensitat, de compromís militant, d'activitat d'ensenyament i artística, pero també d'equilibri emocional i familiar. Giné va conèixer la seva parella Malou, que ajudarà a la tècnica en els seus concerts.
El 1978, llançament del seu primer disc LP "Adiu ça va" editat per el "Verseau" de Tolosa. L'enregistrament del disc va tenir lloc a l'església d'Ortafà.
El 18 de maig de 1979, va néixer la seva filla Lea.
El 1980, va publicar amb els seus amics Etienne Sabench (Esteve és president de l'Associació "Adiu ça va" que va organitzar "Canten Giné" amb els Angelets de la Terra/Col·lectiu Joan Pau Giné, homenatge dels Països Catalans a Giné, a partir del 2013) i Gerard López, un llibre per a nens en edat escolar "Els llibrets de Titella" (Edicions "Le Chiendent").
Per tant, reitera el seu compromís amb la variant rossellonesa del català que va despertar polèmica en la qual comptarà amb el suport de figures com el científic Gérard Vassalls, l'arquitecte arqueòleg Roger Grau i fins i tot el professor i escriptor Pere Verdaguer, que va posicionar el català d'en Giné en el corrent popular de "Un tal" (o Albert Saisset, poeta nord-català del segle XIX).
Organitza en Elne, un Festival de Cultura català, seguint el model de la de Bages.
El 1981 s'organitza Marquixanes, un Festival de la Cançó català. L'esdeveniment, sota una tenda de campanya, serà de tres anys.
El 1982, va dimitir de l'Educació Nacional francesa. Va acabar de fer de professor a Tuïr on va quedar de l'octubre de 1981 al febrer de 1982.
Giné s'encarrega de les terres de la família i esdevé col·laborador del celler "La Barnède". Aquesta re-arrelament amb el cultiu de la vinya el radicalitza una mica més com a catalanista, especialment després d'una estada a París, on va ser convidat a cantar i on va passar uns mesos, que no el va satisfer.
" …En son sopat de Montparnasse, prendre metros cambiar de gares … ", canta Giné en una de les seves noves cançons.
Registra a la "Fonothèque" de Narbona un casset de dotze noves cançons.
Nadal de 1984, llançament del seu segon àlbum "Bona Nit Cargol"; Han passat 6 anys, només interromputs en l'àmbit editorial amb la publicació d'un petit fullet de lletres de cançons, que també inclou textos de Maria Andrea.
"Bona Nit Cargol" tanca el període dels anys "Adiu ça va". El títol no deixa de tenir certa ironia. Va passar el temps i van desaparèixer les il·lusions de creure que seria fàcil crear i editar en català a Catalunya Nord. Això no ha canviat 30 anys després pels músics que canten en català a l'estat francès. Desencant artístic, separació familiar, decepcions com a militant.
Es va traslladar a París on retroba amics de Perpinyà que hi van anar a provar sort: Antoine Candélas, Serge Llado, l'actor Maurice Durozier i el cantant d'expressió catalana Toni Montané. Amb aquest últim, va trobar treball en l'escola on Toni fa de professor.
4) ELS ANYS PARISENCS 1984-1993
Giné no continuarà a tirar endavant? Ha dit adéu per sempre a Bages?
Esdevindrà un entre molts catalans exiliats a la capital, tornat al país només per les vacances, als quals havia vingut a portar diverses vegades un aire musical del país?
Comença una nova vida. Es va unir amb Dominique. És professor de matemàtiques, física i lletres a la "Cambra Sindical de Perruqueria" i la "Cambra Sindical de l'Alta Costura".
Sense abandonar la seva guitarra i escriure en català, però també en francès, idioma que torna a utilitzar més fàcilment, ara té altres interessos.
Va fer cursos de dibuix i pintura, va al cabaret, llegeix cada vegada més llibres de ciències socials. No ha abandonat el gust per la psicologia.
El coneixement propi sempre ha estat una de les seves cares ocultes, igual que el coneixement dels altres (altres paisatges, altres llengües, altres cultures), que persegueix a través de viatges: Itàlia, Iugoslàvia, Marroc, Sàhara ...
23 setembre 1986: Naixement de la seva filla Maria.
El 1988 va assistir a classes de Alfonso Caycedo, neuropsiquiatra colombià, fundador de la sofrologia (una filosofia de la salut feta d'exercicis físics i mentals).
El 1990 obté el diploma de sofrologia a Andorra i això li permet obrir una oficina. Preveu, a partir d'aquest moment, la pràctica professional de la sofrologia quan tornarà al país i particularment a Bages.
8 agost 1991: naixement del seu fill Simó.
Aquest mateix any, va fer un programa a "Ràdio País" (a París) que va batejar naturalment "Adiu ça va". Conta històries (aspecte poc conegut de la seva creativitat) i rep cantants de Perpinyà i Barcelona.
Torna al país per les vacances o les veremes. Torna a l'acció militant? Nostàlgia del Canigó i de la Mediterrània?
L'explosió musical, l'edat d'or de la dècada 1970-1980, ja s'ha acabat.
Jordi Barre es manté al capdavant de la cançó en català, però gairebé sol. Giné observa amb satisfacció l' "èxit" d'un dels seus compatriotes de Bages, Albert Bueno... No obstant els afeccionats d'en Giné no el van oblidar. I en té molts, més enllà de les disputes lingüístiques insignificants. Ell té amics a tot arreu: a "Ràdio Arrels" (Pere Manzanares), a "Radio France Roussillon" (Gerard Jacquet, Norbert Narach, Esteve Valls), a les edicions "Trabucaire" (Robert Avril), en associacions culturals, entre organitzadors d'esdeveniments populars.
Entre 1985 i 1993, el criden almenys un cop l'any per actuar a Catalunya Nord.
1985 és convidat pel club "Amics dels Poetes" del CDACC, organitzat pel poeta Joan Iglesis a Perpinyà.
1989 és convidat pel cabaret "Le clin d’oeil" de Ria. Va crear la fórmula de "Ollada Espectacle" que va tornar a organitzar en el mateix poble anys després l'Enric Balaguer en un concert amb Comelade i Jacquet.
En 1991 és convidat al festival de Toluges "Pau i Treba de Deu", poble amb el qual sempre va mantenir l'amistat (amb el de Sant Nazari de Rosselló) perquè hi havia iniciat a cantar en solitari el Nadal de 1976.
El març de 1993 va ser convidatr a cantar al Parc de Clairfont de Toluges per la tradicional "Calçotada" de l'associació "Arrels".
1993: va ser convidat a finals de maig per l'associació del Mil·lenni del Castell Medieval de Castellnou.
5) LA MORT DEL POETA
El 1993 va morir en un accident de trànsit, el retorn a París.
Va ser el dia després del seu recital a Castelnou.
L'Indépendant, El Punt, L'Avui et toutes les radios locales consacrent à sa disparition de longs articles et de nombreuses émissions. La foule immense réunie pour ses obsèques à Bages témoigne de l'importance de Joan Pau Giné, ce chanteur, venu du peuple, qui lui est resté fidèle, en particulier durant les dix-sept ans consacrés à servir, dans son style mi-bohémien,
mi-philosophe, la tendresse et la malice chevillées à ses lèvres et à ses yeux, la chanson catalane.
Tant pis si certains lui contestent le titre de poète, le pénalisent pour son usage si vivant et si baroque du catalan, tant pis si quelques-uns lui discutent une légitime entrée dans les anthologies ou les encyclopédies, pour nous il a été et restera ce "merla rialler" du "Temps des Cerises" de Jean-Baptiste Clément, repris par un de ces troubadours qui eurent vingt ans et toute la générosité joyeuse de "Mai 68".
Pour nous, Joan Pau Giné demeurera encore longtemps un merveilleux «Camarade Bonheur».
La voix de Joan Pau s'est tue et, avec elle aussi, celle du "xirment", du "cargol", du "cuc" …
>>> Quelques bons mots de Joan Pau Giné
« Cal parlar francès, i sobretot callar»
«Seu fora que cames !» (vexat, quan un cop li van refusar l’entrada en una rotllana de sardana)
« (...) Jo pensi que el català és pas altra cosa que l’emoció. És això el català. És emoció. Endefora d’això hi ha pas català, hi ha pas francès, hi ha pas res de res. (...)»
>>> Joan Pau Giné en récital
Bona nit a tothom : me fa plaer de ser aqui amb vosaltres aquesta nit. Jo me dic Joan Pau Giné. (C'est par ces mots qu'il commençait ses récitals).
Comme chacun d’entre nous ici, j’ai l’impression de ne pas avoir eu à choisir ma langue maternelle qui, en l’occurrence, a été le catalan.
Egalement de culture française, on m’a raconté l’histoire du Petit Chaperon Rouge qui m’a aussitôt donné une érection et de multiples fantasmes parmi lesquels celui-ci qui a pris la forme d’une chanson : La capuxeta roja.
Je suis né tout près de Perpignan, dans un village qui ressemble à tous les villages avec des yeux, une bouche, un nez, des oreilles et des rues qui partent de la place publique et qui arrivent jusqu’ici. Mon village s’appelle Bages : Bages.
Dans mon village, il y avait une école où on pouvait voyager pendant 16 ans, toujours assis. On rencontrait des gens venus d’ailleurs qui avaient voyagé, eux, pendant plusieurs siècles. Avec des noms qui sentent bon la banlieue : Pyrrhus, Hermione, Aggrippine, Néron… des gens qui se foutaient sur la gueule en alexandrins. C’est ça la classe : El grec.
Je suis sur mon vélo et je roule tranquillement. Mes pneus sont à plat et je le sais. Je n’ai pas l’intention de descendre. J’ai la flemme. De toutes façons, le premier qui s’endort réveille l’autre : Adiu, ça va.
>>> Interview
« Ceux qui rêvent d’un pays catalan et d’une langue catalane rêveront sans moi », Joan Pau Giné.
De l’entêtement, de l’insolence, mais aussi une passion sincère et forte. Le Roussillon vaut bien une messe. Il chante, en tous cas, pour lui depuis 5 ans.
- Peut-on parler d’un public pour la chanson catalane ?
JPG : Ce public existe réellement. Mais souvent, il est mal informé publicitairement, faute d’un réseau de gens sérieux qui prennent localement en charge l’organisation. Un bon relais, ce serait les comités des fêtes, ou encore les associations culturelles et sportives.
- Et les organisations, disons politiques ?
JPG : Quand elles ont besoin de nous elles nous appellent, mais dans la pratique, au niveau des municipalités qu’elles occupent, la culture pure ne semble pas les intéresser. En fait, nous, chanteurs, nous servons des causes mais on ne sert pas la cause des chanteurs.
- As-tu noté une évolution dans ton public, depuis tes premiers récitals ?
JPG : Au début, les gens venaient m’écouter mais… pour rire. Entendre quelqu’un chanter en catalan les amusait. Je me souviens d’avoir chanté "El meu pais" avec un éclat de rire à chaque vers. C’était plutôt dur ! A présent, l’attitude est bien différente : attention plus profonde, réception plus intérieure.
Ce n’est plus la grosse rigolade, on s’est aperçu que l’on peut dire, en catalan, des choses sérieuses. Les applaudissements sont devenus plus chaleureux.
- Chanter seul, n’est-ce pas un handicap ?
JPG : Pour moi, ce n’est pas un problème. Pour le public, c’est sûr, un groupe, comme l’Agram, le Fanal ou Pa amb oli, bénéficie d’un renom, d’une aura.
Mais il ne lui apporte pas forcément plus. Cependant, chanter seul suppose que l’on ait un répertoire de thèmes et de mélodies à la fois riche et très varié et, surtout, que l’on soit physiquement très en forme.
- Tu as choisi de t’exprimer dans un catalan que dans certains milieux on réprouve sévèrement. Pourquoi ce parti pris ?
JPG : La chanson sert à la communication. Elle peut avoir aussi une incidence esthétique. Pour moi, il n’y a pas de langues pures et de langues impures. Il existe partout un langage qui permet la communication ; je me situe dans ce langage et je n’ai aucun problème de communication et de compréhension.
Mais la communication résolue, il est possible d’aller plus loin, vers l’esthétique, à savoir la beauté formelle et le contenu de fond de la chanson. Sur ce point, je me rends compte que la langue roussillonnaise que nous parlons permet une approche et une saisie poétique aussi profonde et serrée que n’importe quelle autre. La poésie a plus à voir, me semble-t-il, avec la sensibilité collective d’un peuple qu’avec la qualité d’une langue.
- Mais ce choix ne limite-t-il pas une expansion qui semblerait logique vers la Catalogne Sud ?
JPG : J’ai toujours apprécié Llach comme Raimon. Le premier est ampourdanais, l’autre valencien. Il y a autant de différences entre le catalan de Llach et celui de Raimon qu’entre le mien et celui de Llach ou de Raimon. Or, que je sache, on n’a jamais refusé Raimon sous prétexte que sa langue n’était pas tout à fait celle de Llach. En fait, on refuse le catalan roussillonnais. Mais au fond, peut-être est-ce moins la langue que des raisons politiques qui expliquent cet état de choses.
Le Roussillon, d’autre part, porte sur son dos un énorme complexe (que pour ma part, j’entends pleinement assumer). C’est une vieille histoire. Jadis, il crut résoudre ce complexe en adoptant le français. Maintenant, universellement, s’est dessiné un choix vers le barcelonais. N’est-il pas curieux de constater que, dans les deux cas, le roussillonnais fait appel à une langue extérieure ?
- Ne prêtes-tu pas par là le flanc à la critique qui t’a été faite récemment de roussillonisme étroit ?
JPG : A défaut d’être une et indivisible, la langue catalane représente à mes yeux l’ensemble des catalans parlés en différents endroits. Les frontières sont certes mal définies mais là où il est, le catalan me semble justement riche de toutes ses différences et de ses dialectes. Privilégier un catalan par rapport aux autres, c’est, ni plus ni moins, faire du centralisme.
De la même manière qu’il y a plusieurs països catalans, il y a plusieurs langues catalanes.
- Acceptes-tu l’image de chanteur populiste qu’on t’accole très souvent ?
JPG : Le terme populiste ne veut rien dire. Le problème pour un chanteur aujourd’hui, c’est d’intéresser le public. Je m’y suis toujours attelé. Mes chansons les plus anciennes, comme les plus nouvelles, font partie d’une philosophie généreuse du vivre et de l’être. Ceux qui me gratifient du qualificatif de populiste, ce sont généralement des intellectuels. Mon expérience de chanteur, au contact du public, m’a montré qu’il faut plus de temps à un intellectuel pour comprendre certaines choses et, encore, on n’est jamais assuré qu’il les a comprises. Alors que les intellectuels mettent un mot, moi je mets tout le poids de ma sensibilité, de mon engagement.
- Quel engagement ?
JPG : Etre aujourd’hui auteur compositeur interprète, c’est donner un témoignage d’homme d’être au monde. La politique, pour moi, est un épiphénomène, un phénomène de surface.
- Comment reçois-tu les mots d’autonomie, d’indépendance et de réunification?
JPG : J’ai toujours un tempérament autonome, indépendant et anti-étatique.
(Interview recueillie par son ami Jacques Quéralt)
>>> A propos de Joan Pau Giné et de sa place dans la « Nova Cançó »
Joan Pau Giné représente celui que tout Roussillonnais pourrait devenir s’il cédait à l’instinct de conservation de sa langue et de sa culture, à savoir : se munir de ses textes, de ses propres paroles, empoigner une guitare et surgir dans la rue, comme on s’emparerait d’un bâton de pèlerin – injustement laissé de côté – pour aller prêcher le « rossellonès »… acte que nous n’accomplissons pas, pour n’être ni musicien, ni poète, pour ne pas oser parler catalan… ou, plus franchement, pour ne pas détenir cette alliance explosive de talent et de courage qui amena Giné à entamer son action de chanteur, voilà près de dix ans. Il a choisi la voie esquissée par Albert Saisset (Un tal) en disant non au « normatiu » pour affirmer son adhésion au catalan de la plaine du Roussillon. C’est donc une tentative de sauvegarde et de récupération d’une spécificité linguistique (dialecte) avant d’être celle d’une langue.
L’impression de Giné chantant, c’est un peu ce que l’on éprouverait face à « une force tranquille ». Assis sur une chaise qui semble avoir toujours été sienne, il caresse d’un rythme régulier une guitare chue d’on ne sait où dans ses mains caleuses de rural… et sa voix, grave comme une sentence, linéaire comme une aiguille, remue le public. Il possède un vocabulaire et une imagination qui semblent issus de sa simplicité. Joan Pau Giné tire parti d’une profondeur qui prend possession de l’auditeur réticent… juste après que l’humour l’ait désarmé… L’art de Giné fait que nous rions de nos propres faiblesses quand nous devrions nous en désoler. Il pourrait en ce sens être comparé à Molière, « un Molière qui chanterait en catalan »…
Un autre caractère des textes de Giné est contenu dans le fait qu’ils sont pensés en catalan… Le public se reconnaît en Giné pour l’écouter de son
oreille autochtone.
De « Bona nit cargol », disque qu’il nous a livré récemment, à son premier enregistrement, « Adiu, ça va », quelque cinq ans ont passé… On constate entre ces deux « moments » un désir d’évolution musicale chez lui.
Quant à ses vers, ils sont comme des grains de raisin qui entreraient dans les cuves de notre mémoire, tout en nous souhaitant que le breuvage qui en naîtra ait du degré. La cuvée « Bona nit cargol » nous dévoile un visage de poète plus engagé dans la tendresse qu’il porte à sa terre… un visage qui sait conserver le regard de la sensibilité.
(Joan Iglesis, Le jardin des poètes)
>>> Témoignages
… Une autre clé du succès de Giné tient sans doute à son attitude idéologique.
De même qu’il se tient près du peuple quant à son langage, il se tient près de lui quant à ses sujets, à sa joie de vivre malgré les difficultés, à son esprit satirique. Ne se croyant pas investi d’une mission de prophète, il se contente d’être bien avec son public, avec lequel s’établit une complicité, comme entre les participants d’une veillée près du feu au temps jadis. Et là, tous ensemble, on réfléchit sans mots d’ordre sur la situation, à ce que l’on pourrait faire pour se réaliser un peu mieux, en l’occurrence pour se réaliser un peu mieux comme Catalans. Et de ce contact, de cet échange, il n’en sort pas des révélations, mais le courage simple de continuer la tâche le lendemain. Comme les Catalans ont du pain sur la planche, n’est-ce pas là, une excellente attitude ?
(Pere Verdaguer, Professeur - écrivain)
Si j’avais à parler en trois mots de Joan Pau Giné, je dirais : de l’esprit, du coeur, de la qualité (ce dernier mot étant le résultat logique des deux premiers).
En un mot ? Un homme ! Un homme du peuple, un homme avec un petit «h», c’est là sa grandeur.
(Antoine Candélas)
Chanson qui n'a pas été éditée dans les hommage à Joan Pau Giné en 2003 et 2013